•  HAUTE SURVEILLANCE de Jean Genet par Jm Musial.


     YEUX-VERTS : "Ce n'est rien savoir du malheur si vous croyez qu'on peut le choisir ? Le mien m'a choisi. J'ai tout essayé pour m'en dépêtrer. J'ai lutté, boxé, dansé, j'ai même chanté, et l'on peut en sourire, le malheur je l'ai d'abord refusé. C'est seulement quand j'ai vu que tout était foutu que j'ai compris : il me le fallait total."

    HAUTE-SURVEILLANCE affirme le  nécessaire scandale de l'être brut : souterrain, inconscient, sourdement divisé. Sous le signe aussi cruel qu'essentiel de l'isolement glorieux, de la forteresse et de la mort, seule une haine farouche, tourmentant sa propre chair, se trouvera à même de le sceller en vue de l'expiation, la cérémonie rêvée paradoxalement, le meurtre.

    L'espace de la prison est sacré, l'espace du dehors est profane.  La vieillesse est perceptible dès l'adolescence, par conséquence le devenir inclus dans le présent fait que l'existence n'est qu'une entière putréfaction. Voilà pourquoi la première partie de Haute Surveillance n'est qu'un rite en éternel recommencement pour permettre d'assister à l'ultime : le meurtre.

    La tragédie commence parce que le rite s'arrête. On ne s'improvise pas glorieux, on est condamné à la grandeur.

    Tout est centré, tendu vers la cellule. Tout part au centre, aucune réplique n'invite vers l'extérieur. Aucune question d'avenir n'est envisagée. Tout est centré sur le crime de Yeux-verts qui entraîne les autres prisonniers à sa suite.

    Même l'évasion n'est  qu'une hypothèse métaphorique. Cayenne, le monde des chapeaux de paille et des palmiers n'est plus qu'une destination de carte postale.

    Yeux-Verts cherche désespérement la porte de l'antichambre des dieux. Sa danse figurerait un passage impossible.

    HAUTE SURVEILLANCE affirme la suprême beauté de la force vitale, celle des fleurs sauvages qui, à l'instar des grands criminels, ne savent obéir à d'autre loi que celle de l'incendie  intérieur et dévorant qui pousse leur corps de l'avant... 

    Haute Surveillance considére la victoire sans appel de la nature.

                                                                                                                                                                                                                                                                                                                                                                                                                                                                                                                                                                                                                                           Le théâtre ne saurait faire ainsi du scandale révélé une oeuvre d'art harmonieuse et consolante.

    Notre fleur est CARNIVORE..."


    Notre fleur est carnivore

    cahier de mise en scène 1992© Jm Musial


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  • Affiche


    HAUTE-SURVEILLANCE

    Texte : Jean GENET

    Scénographie et Mise en scène  :  Jean-Marc MUSIAL

    Conseiller Littéraire  :  Cyril NOYELLE

    Création musicale  :  Franck LAMBERT

    YEUX-VERTS .........CARMELO CARPENITO

    MAURICE ..............BOUZID BAZI

    LEFRANC...............JEAN-MARC MUSIAL

    LE GARDIEN..........JACQUES BESNIER

     

    HAUTE-SURVEILLANCE a été créée au PALAIS RAMEAU, Lille du 13 au 21 Mars 1992.


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  • JM MUSIAL

    "Je reste attiré par les êtres qu'on appelle ténébreux, ceux en qui quelque chose me révèle la nuit, ceux qui sont enveloppés de nuit, fut-ce cette nuit qu'est encore l'éclat dont ils rayonnent." Jean Genet, Pompes Funèbres.

     Incarcérés dans la cellule d'une gigantesque forteresse, trois détenus partagent une existence tendue que ponctuent le courrier, les visites au parloir et la surveillance discrète d'un gardien. Yeux-Verts, analphabète ("Je suis une belle phrase"), ancien matelot, portant sur la poitrine le tatouage de sa femme, est hanté par la mort à laquelle on l'a condamné. Son prestige de grand criminel provoque chez ses deux camarades, Lefranc et Maurice, deux petits voleurs, d'incessantes querelles visant tantôt la personne même de Yeux-Verts, tantôt sa femme attendue au parloir, tantôt Boule-de-neige, condamné à mort à un autre étage. Lefranc chargé de la correspondance de Yeux-verts qui cache à sa femme son handicap, profite perfidement de son avantage en donnant libre-cours à sa convoitise jalouse. Maurice non plus n'a pas choisi son malheur, sa "jolie petite-gueule de voyou suffit à l'accuser".

    Considérée comme un brouillon par Jean GENET, "HAUTE-SURVEILLANCE" fut réécrite plusieurs fois, par couches (de 1949 à 1985),  devenant par là même une oeuvre  palimpseste.

    « Si j’ai voulu le plein feu sur scène, c’est afin que chaque acteur n’aille pas noyer une erreur, une faute passagère, son épuisement ou son indifférence dans une salvatrice obscurité. Bien sûr tant de lumière lui fera mal. D’être si fortement éclairé l’obligera peut-être…" Jean Genet, Lettre à Roger Blin.

     

    PAULO-LES-DENTS-FLEURIES par la force obscure et mystérieuse des choses, tue la femme "qui voulait son lilas" et devient pour Haute-Surveillance : YEUX-VERTS (Carmelo CARPENITO).

    De la série d'évènements troubles qui conduisit YEUX-VERTS au meurtre, il résulte au lieu d'un enchaînement sans faille, une difficulté majeure appelant à l'exorcisme ; explosion poétique à l'échelle de la prison entière.

    Une danse solitaire renouant dans le silence avec les rites perdus des espaces sacrés, d'où il entrevoit de l'anti-chambre de la mort, l'anti-chambre des dieux.

    YEUX-VERTS femme, YEUX-VERTS forteresse, affronte son destin et accepte son malheur, il le veut total. Pour y parvenir, il se confondra au prix de la trahison de ceux que sa belle force criminelle enivrait, MAURICE  et LEFRANC.

    YEUX-VERTS se remémore son crime, il en a conscience et de ce fait, dans la hierarchie quasi-féodale que dresse GENET, il ne pourra jamais égaler BOULE-DE-NEIGE, "le sauvage qui a le droit de tuer les gens et même de les manger". Car BOULE-DE-NEIGE reste indifférent à ce qu'il a fait. Il chante.

    Même couvert de cirage YEUX-VERTS restera en-dessous de BOULE-DE-NEIGE. Mais s'ils ne sont pas au même niveau, aucun n'a choisi son crime, c'est le crime qui les a choisis,ÉLUS de la Fatalité, l'un par inadvertance, l'autre par appât du gain.


    LEFRANC, JULES ou GEORGES (Jean-Marc MUSIAL) vit au milieu des signes. Il se fabrique de fausses marques de gloire. Son tatouage est un simulacre.

    LEFRANC se nourrit de sa fascination pour les grands criminels au point de collectionner photos et articles de presse à scandale sous la pierre tombale de sa cellule.

    Il est l'homme du paraître, celui  qui cherche le malheur parce qu'il brille de la lumière noire du refus absolu. Lui a provoqué son malheur et ne portera jamais le sceau de la Fatalité, il ne pourra pas rejoindre YEUX-VERTS malgré le meurtre de MAURICE.


    MAURICE (Bouzid BAZI), 17 ans, est la victime consentante ; amoureux fou de YEUX-VERTS, il se place sous sa protection illusoire ; pieds-nus, dévoué et dévoré par la jalousie, il poussera LEFRANC à son propre meurtre, ce crime final qui clôt la pièce sous le regard indifférent du gardien (Emmanuel Plovier). 

    Avec une attitude immanente d'acceptation de sa situation, sans aucune tentative d'ouverture, il ne perçoit pas la gravité de ce qui se trame. Mieux il y participe. Il y a chez MAURICE une tendance suicidaire qui se manifeste dans une nécessité sacrificielle. Il est persuadé que YEUX-VERTS le défendra toujours. Sauf à la dernière réplique, jamais il ne perçoit qu'il va mourir.

    LEFRANC par son crime exprime ce besoin désespéré de s'approprier la part la plus élémentaire, la part maudite de l'être, celle qui différencie l'homme anonyme et insignifiant à leurs yeux, du beau meurtrier reconnaissant dans la mort par condamnation son miroir le plus fidèle.

     

    Yeux-Verts, Maurice et Lefranc

    Lefranc (Jm Musial), Yeux-Verts (Carmelo Carpenito), Maurice (Bouzid Bazi)




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  • LES MOTS DU CORPS - Par Cécile Rognon -


    Les lettres immenses, dessinent sur le mur l’unique décor : MILCZENIE, le silence en polonais. Pour le reste le corps suffit. Jean-Marc Musial pose sur la petite scène des Nuits Blanches la première étape d’une recherche théâtrale à huit comédiens : « la forme pure», des mots qui reviennent comme une profession de foi dans la bouche du metteur en scène.

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  • Par ERIC NIVEL - CHERCHEUR Intelligence .Artificielle

    Center for Analysis & Design of Intelligent Agents - Reykjavick University

    http://ailab.ru.is/

     

    Cet aspect de ROMA AMOR vise la création de la scène comme objet autonome, i.e. qui produit sa forme par les seuls effets de sa dynamique intérieure. La question est de savoir où trouver « l’intérieur ».

    Nous envisageons ici la morphogenèse comme succession de mouvements d’adaptation qui opèrent les uns sur les autres (à des vitesses différentes), y compris sur les matières inertes qui sont les données de la scène (bandes sonores, cinéma, textes, etc. : processus à vitesse nulle). La raison de ces opérations est la seule modification des processus et des structures qui en résultent. Toute action sur l’environnement est un effet de bord.

    De là disparaît la distinction sujet/objet, qui à tout le mieux ne saurait être qu’impermanente : c’est un regard figé dans l’éternité pour qui seuls comptent les restes. Exit de même la notion de finalité (et symétriquement, de la « dernière analyse ») : l’intérieur est un mécanisme. Et il le demeure tant qu’il fonctionne, car c’est là sa matière constitutive : le mouvement.

    Autrement dit « la fonction crée l’organe », c’est-à-dire que c’est le fonctionnement qui catalyse la production d’une forme dans son substrat. Ne pas confondre fonction et rôle : le rôle, la représentation, sont le mode d’existence adopté par l’objet quand on l’oblige à signifier dans une réalité qui n’est pas la sienne (i.e. une réalité dont les processus n’ont pas interagi avec les siens).

    Dans cette configuration, l’individu émerge à ses propres frontières. Considérons l’ensemble des êtres multiples (décors, acteurs, machinerie, lumière, projection cinématographiques, etc.) qui la composent. Ils constituent à la fois des éléments passifs (ils sont la matière) et actifs : c’est de l’adaptation mutuelle de leurs dynamiques que doit naître la scène, à la fois prédéterminée par ses créateurs et robuste aux modifications (temps réel) de ses conditions :   c’est un système opérationnellement clos, hybride, fait de machines et d’  humains.

    Le cœur de l’affaire est l’opération : la raison d’une production est recherchée dans son action sur son contexte. Un son : l’ensemble des rythmes ou perturbations biologiques qui naissent chez l’individu qui reçoit les vibrations acoustiques. Pas un son en soi, mais en l’autre.

    Nous construirons les objets techniques qui assureront la réinterprétation des actes des composantes humaines (dynamique proactive) en les flux d’information qui pilotent à leur tour tout ou partie des effecteurs de théâtre, pour enfin stimuler la réinterprétation humaine et agir sur ses propres effecteurs (son corps s’il joue, son regard s’il cadre, etc.)(dynamique passive, réceptive).


    > composantes motrices

    1.animaux artificiels (animats) : ce sont des flux de programmes adaptatifs ; leurs frottements les uns sur les autres produisent des rythmes internes (rétroaction sur les processus d’adaptation) et externes (construction de commandes vers les effecteurs de la scène). Ce sont des programmes non déterministes purement réactifs. La cognition est un effet secondaire de leurs processus internes : c’est l’individuation temporaire d’états stables.

    2.être humain interfacé : versant proactif d’un élément de la scène (acteur, metteur en scène, etc.) agissant sur l’équilibre des animaux via un programme d’interface. C’est un programme qui assure l’expression mutuelle des opérations humaines et machiniques.

    > composantes inertes

    1.capteurs : traduisent des phénomènes physico-chimiques en données
    2.effecteurs : ce sont l’ensemble des programmes qui permettent de composer des effets, et de les déclencher.
    3.machinerie : plates-formes techniques (projection, illumination, acoustique,etc.) partagées avec le personnel technique dans le cadre d’une utilisation hybride autonomie/allonomie
    4.être humains, organes de la scène.
    5.matières artistiques conçues hors la scène (temps différé): textes, films, musiques, langage scénique, etc.

    Skene artificielle




    Ce travail s’inspire des œuvres de:

    Wilhelm Reich
    René Thom
    Francisco Varela
    Heinrich von Forster
    Alonzo Church

    Il est une réalisation de l’ingénierie constructiviste.


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  • Extrait de la dernière interview de Pasolini  réalisée le 1er novembre 1975-

    Editée en traduction française chez ALLIA en 2010.

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  • 29 décembre 2011 / LIBERATION Pasolini revient et il n’est pas content Par ERIC LORET, ROBERT MAGGIORI Archives . L’avant-dernière interview du cinéaste, perdue depuis trente ans, a été retrouvée en Suède. DOCUMENT SONORE INEDIT

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  • "Le rêve du rêve du rêve devait avoir une fin mais non cet amour, qu'est-ce qu'il a voulu dire par là Calderon ?" PP Pasolini

     

    CALDERON de Pier Paolo PASOLINI,  palimpseste théâtral de La vie est un songe de Piedro Calderón De LA BARCA, a pour situation l’Espagne, de VELASQUEZ à l’après-franquisme. Pasolini réécrit le sommeil métaphorique calderonien pour traiter du changement de nature du pouvoir et du rapport intime que chacun entretient avec lui.

     Sur fond de la toile Las Meninas de Diego Rodriguez Velasquez,  des Mots et des choses de Michel Foucault et de la tragédie de la guerre d'Espagne, - L'anarchie est dans l'orbite du pouvoir - Pasolini entreprend une description de description, véritable généalogie du pouvoir. Dorénavant, il se recrée en générant lui-même sa propre contestation, en absorbant par un fascisme ordinaire  le corps et l’esprit de l’autre pour mieux être servi.

    CALDERON est une tragédie politique  en forme de rose. Elle a de multiples destinations. 

    Notre mise en scène  est axée essentiellement sur la démultiplication des supports, qu'ils soient théâtraux, cinématographiques et technologiques. Cela est Pasolini mais c'est aussi l'application de notre théâtre de recherche. Pour une meilleure lecture de Calderon, tant sur son point de vue dramaturgique que théâtral, nous avons filmé en 16mm 3 épisodes sur les 16 que contient la pièce et assumons sur l'espace scénique la présence anthropomorphique du Roi et de la Reine, soit 3 épisodes en vidéo/synthèse. Les autres sont traités de manière théâtrale.

    Dramaturgiquement Calderon l'une des plus belles réussites formelles de Pasolini, exige l'addition de tous les paramètres qui répondent au problème de la convention théâtrale, donc de la représentation. Il s'agit alors de synthétiser nos recherches dans le chaudron pasolinien et de moderniser sa réception en multipliant les supports - théâtre, cinéma, vidéo directe, images de synthèse, documents photographiques, archives  audio-visuelles - d'ailleurs inscrits eux-mêmes dans l'écriture, de mettre en scène la représentation de la représentation.

                                                                                Virginie di Ricci et Jean-Marc Musial 2001

    La représentation de la représentation


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  • Les suivantes Michel FOUCAULT 

     ...Le miroir assure une métathèse de la visibilité qui entame à la fois l’espace représenté dans le tableau et sa nature de représentation ; il fait voir au centre de la toile, ce qui du tableau est deux fois nécessairement invisible.
    Etrange façon d’appliquer au pied de la lettre, mais en le retournant, le conseil que le vieux Pachero avait donné, paraît-il à son élève, lorsqu’il travaillait dans l’atelier de Séville :
                                                        « L’IMAGE DOIT SORTIR DU CADRE »

     

    …Mais le rapport du langage à  la peinture est un rapport infini. Non pas que la parole soit imparfaite, et en face du visible dans un déficit qu’elle s’efforcerait  en vain de rattraper. Ils sont irréductibles l’un  à l’autre : on a beau dire ce qu’on voit, ce qu’on voit ne loge jamais dans ce qu’on dit, et on a beau faire voir, par des images, des métaphores, des comparaisons, ce qu’on est en train de dire, le lieu où elles resplendissent n’est pas celui que déploient les yeux, mais celui que définissent les successions de la syntaxe.


    ….Le miroir en faisant voir, au-delà même des murs de l’atelier, ce qui se passe en avant du tableau, fait osciller, dans sa dimension sagittale, l’intérieur et l’extérieur.

     


    …Quel est ce spectacle, qui sont ces visages qui se reflètent d’abord au fond des prunelles de l’infante, puis des courtisans et du peintre, et finalement dans la clarté lointaine du miroir ? mais la question aussitôt se dédouble : le visage que réfléchit le miroir, c’est également celui qui le contemple ; ce que regardent tous les personnages du tableau, ce sont aussi bien les personnages aux yeux de qui ils sont offerts comme une scène à contempler.
    Le tableau en son entier regarde une scène pour qui il est à son tour une scène.

     

    …Au milieu de tous ces visages attentifs, de tous ces corps parés, ils sont la plus pâle, la plus irréelle, la plus compromise de toutes les images : un mouvement, un peu de lumière suffiraient à les faire s’évanouir. De tous ces personnages en représentation, ils sont aussi les plus négligés, car nul ne prête attention à ce reflet qui se glisse derrière tout le monde et s’introduit silencieusement par un espace insoupçonné ; dans la mesure où ils sont visibles, ils sont la forme la plus frêle et la plus éloignée de toute réalité. Inversement, dans la mesure où, résidant à l’extérieur du tableau, il sont retirés en une invisibilité essentielle, ils ordonnent autour d’eux toute la représentation ; c’est à eux qu’on fait face, vers eux qu’on se tourne, à leurs yeux qu’on présente la princesse dans sa robe de fête ; de la toile retournée à l’infante et de celle-ci au nain jouant à l’extrême droite, une courbe se dessine pour ordonner à leur regard toute la disposition du tableau, et faire apparaître ainsi le véritable centre de la composition auquel le regard de l’infante et l’image dans le miroir sont finalement soumis...


    ...absence du roi, - absence qui est un artifice du peintre. Mais cet artifice recouvre et désigne une vacance qui, elle, est immédiate : celle du peintre et du spectateur quand ils regardent ou composent le tableau. C’est que peut-être, en ce tableau comme en toute représentation dont il est pour ainsi dire l’essence manifestée, l’invisibilité profonde de ce qu’on voit est solidaire de l’invisibilité de celui qui voit, ..

     


    ............./Dans la profondeur qui traverse la toile, la creuse fictivement, et la projette en avant d'elle-même, il n'est pas possible que le pur bonheur de l'image offre jamais en pleine lumière le maître qui représente et le souverain qu'on représente.


    .... Peut-être y a-t-il, dans ce tableau de Vélasquez, comme la représentation de la représentation classique, et la définition de l'espace qu'elle ouvre. Elle entreprend en effet de s'y représenter en tous ses éléments, avec ses images, les regards auxquels elle s'offre, les visages qu'elle rend visibles, les gestes qui la font naître. Mais là, dans cette dispersion qu'elle recueille et étale tout ensemble, un vide essentiel est impérieusement indiqué de toutes parts : la disparition nécessaire de ce qui la fonde, - de celui aux yeux de qui elle n'est que ressemblance. Ce sujet même - qui est le même - a été élidé. Et libre enfin de ce rapport qui l'enchainait, la représentation peut se donner comme pure représentation.

    Les suivantes - Michel FOUCAULT (Les Mots et les choses)


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  • Pier Paolo PASOLINI (1922-1975)

    Cinéaste, poète, romancier et auteur de théâtre.


     Bio de Pier Paolo Pasolini

    Bio de Pier Paolo Pasolini

    Pasolini le 1er novembre 1975

    Né à Bologne. Il a passé la majeure partie de son existence à Rome.

    Il se fait tout d'abord connaître en tant que poète. Ses premières poésies, écrites en dialecte frioulan (1942), montrent son attachement au monde paysan. "Poète civil de gauche", ses écrits sont le reflet de son engagement et de sa révolte.

    En 1955 paraît son premier roman Les Ragazzi puis en 1959 Une vie violente. Ils vaudront à Pasolini son premier procés. Il aura toute sa vie des démêlés avec la justice (pas moins de 33 procés).

    A la même époque, Pasolini participe à une nouvelle revue littéraire Officina fondée par l'essayiste et romancier Fernando Léonetti. Cette publication se veut engagée, créée dans l'idée de bouleverser le paysage littéraire italien, de lutter contre le néo-réalisme (mouvement intellectuel dominant dans l'Italie des années 50 aussi bien dans le cinéma que dans la littérature).  La revue fait appel à des poètes, des romanciers, c'est dans ce cadre que Pasolini rencontre Alberto Moravia et Elsa Morante : amis fidèles qui le soutiendront toute sa vie.

    L'engagement de Pasolini est également politique. En 1946, il adhère au P.C.I, il en est exclu en 1949 pour immoralité et homosexualité.  Il conservera avec le P.C des liens étroits, le plus souvent conflictuels.

    Si ses débuts sont avant tout littéraires, sa reconnaissance à l'étranger l'est surtout pour son activité de cinéaste. En 1961, il réalise son premier film Accatone. A partir de cette date, il se consacre presque exclusivement au cinéma. "On a dit que j'avais trois idoles : le Christ, Marx et Freud ; ce n'est qu'une formule. En réalité, ma seule idole, c'est la réalité. Si j'ai choisi d'être cinéaste en même temps qu'écrivain ; c'est dû au fait que plutôt qu'exprimer cette réalité à travers ces symboles qui ne sont que des mots j'ai préféré le cinéma comme moyen d'expression : exprimer la réalité à travers la réalité".

    Dans ses premiers films il reprend les thèmes de ses romans : il y évoque la vie dans les faubourgs romains et celle du sous- prolétariat italien. Avec l'évangile selon St Mathieu (1964), il est projeté au centre d'une violente polémique ; accusé par l'Eglise d'avoir une vision faussée du Christ et par les communistes d'être complaisant avec l'Eglise.

    Uccellaci e Uccelini (1966) inaugure une série de films plus difficiles, plus "aristocratiques". Théorème tourné en 1968 clôt ce cycle.

    1968 est une année charnière dans sa carrière. C'est l'année où il met en scène ORGIE (pièce écrite en 1966) avec Laura Betti et Luigi Mezanotte. Pasolini pense alors trouver dans le théâtre une autre voie. A travers le Manifeste pour un nouveau théâtre, il met en avant une conception nouvelle de la mise en scène, du théâtre comme "théâtre de mots". Il fait écrire sur le rebord de la scène : 'NOUS NE VOULONS PAS DE SUCCÉS".

    Cette expérience est un échec, en tout cas ne l'incite pas à continuer dans cette voie. Il abandonne l'idée de faire de la mise en scène sans toutefois abandonner l'écriture théâtrale.

    ORGIE s'inscrit dans un ensemble de six tragédies (Porcherie, Affabulazione, Pylade, Bête de style et Calderon) écrites entre 1965 et 1966 qui marquent nettement sa volonté d'écrire "à travers des personnages un théâtre en vers très semblable à la prose" et correspond à une période de radicalisation de l'oeuvre pasolinienne.

    En 1970, au cinéma, il inaugure le cycle de la trilogie de la vie avec : Le Décameron (1971) puis Les Contes de Canterbury (1972) et Les mille et une nuits (1974), marqué par un retour à la référence littéraire médiévale et au corps nu.

    Son dernier film Salò ou les 120 journées de Sodome, transposition du livre de Sade dans le contexe de la République de Salò (République fasciste créée en 1943 par Mussolini) déclenche une immense vague de protestations. Le film est interdit dans plusieurs pays ainsi qu' en Italie pour obscénité. Le Festival de Paris en assure la première mondiale .

    Le 2 novembre 1975, Pasolini meurt  assassiné avec une extrême violence à Ostie. Les circonstances exactes de sa mort n'ont toujours pas été éclaircies.

     

    Dernier entretien télévisé 11 Octobre 1975


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  • Calderon Affiche

    ©Terribilita


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  • Calderon -

                   Interrogé sur son opinion à propos du caractère politique d'une pièce de théâtre en vers qui venait de paraître, Adriano Sofri (qui, selon le terme conventionnel offensif, est le "leader" de Lotta continua) a déclaré que "d'un point de vue personnel la tragédie l'intéresse tout de même, mais que d'un point de vue politique, il n'a pas de commentaire à faire, son importance est nulle, elle ne fait pas le poids".

                           Adriano Sofri est un de ces jeunes nés avec 68, en 68. Pour lui "politique" signifie "action politique" dans la pratique, "intervention politique" dans un tout autre domaine. Sur d'autres points, il est beaucoup plus souple, intelligent et possibiliste (c'est-à-dire conscient des infinies complications de la réalité) que ses camarades : mais sur ce point il rigidement orthodoxe. Pour lui, la pensée n'est pas pensée, si elle ne se manifeste pas comme action. Aussi bien dans le cas où la pensée est écrite que dans celui où elle est parlée, sa structure linguistique doit avoir le caractère instable et provisoire d'une structure qui aspire à devenir immédiatement autre : autrement dit la structure de l'action. Il n'y a pas d'absolu dans la parole : plus elle vise à être absolue, plus elle est apolitique ou même reactionnaire. Elle doit être animée par le sentiment de son caractère fugace, de sa mission utilitariste, de sa fonction purement pragmatique qui permette, tout au plus, une forme d'expressivité sentimentale. Voilà pourquoi Sofri et ses camarades aiment uniquement les actes d'accusation, les "querelles", les mélopées, les documentations partisanes, vibrantes effusions, les condamnations impitoyables et sans discrimination.  Voilà pourquoi l'écriture est pour eux d'autant plus politique qu'elle est plus plate, conventionnelle, banale, élémentaire, corrigée par une ironie démagogique (qui permette même des dérobades dans l'ambiguité du mépris).

                     La pièce de théâtre sur laquelle Sofri a prononcé son jugement "impersonnel" est de moi : elle s'intitule Calderon et elle est sortie ces jours-ci (mais je l'ai commencée en 1965, à vrai dire, pour la refaire plusieurs fois par la suite : le dernier apport important date de 1972).

              Je suis certain que Calderon est de une de mes plus sûres réussites formelles. Le cours des Cendres de Gramsci et des volumes de poésies des années cinquante s'est remis, je crois, à couler avec plénitude, après une longue période d'aridité (à laquelle ma volonté ne s'est pas opposée). couler formellement, mais aussi politiquement. Sofri aura peut-être pu remarquer ("d'un point de vue personnel") avec quelle légèreté et aussi quelle exactitude, il entre lui-même dans le texte, sous la forme idéalisée (c'est-à-dire physiquement modelée sur d'autres jeunes camarades à lui plus innocents) dans la figure du deuxième étudiant Pablo.

            Je ne veux pas défendre le "caractère politique" de Calderon. Une lecture de mon texte à travers la grille de l'actualisme politique est une lecture, qu'en tant qu'auteur, je ne peux que considérer comme réductrice. Je désirerais plutôt, si la chose était possible, que la grille fût celle d'une politique platonicienne, celle du Banquet ou du Phèdre (car l'ambition d'un auteur ne connaît pas de limites). Par ailleurs je ne puis nier que les "événements" de Calderon appartiennent totalement, surtout dans les derniers "épisodes", à l'actualité politique. Si dans les deux premières parties, Rosaura se réveille du sommeil métaphorique caldéronien dans un état "aristocratique" et "sous-prolétarien" (en s'adaptant ensuite à la réalité de ce réveil), dans la troisième partie, en se réveillant dans le lit d'une petite-bourgeoise de l'époque de la consommation, l'adaptation s'avère beaucoup plus difficile pour elle ; elle en vit l'aliénation et la névrose (exemplairement) et assiste à un véritable changement de nature du pouvoir. Elle assiste, en outre, à la contestation de 1967 et de 1968, comme à un nouveau type d'opposition au pouvoir et à l'aube d'un nouveau siècle où la classe ouvrière n'a été qu'un rêve, rien qu'un rêve. Les "discours" des personnages tournent donc nécessairement autour de ces thèmes d'actualité politique.

               Or, en fait, dans mon drame, tout cela est contemplé (sur la base d'une foi dans le caractère absolu des valeurs formelles), comme si j'étais un habitant du cosmos : et je comprends que cela puisse paraître inacceptable à quelqu'un qui serait engagé dans une lutte politique quotidienne, se donnant l'illusion que cette fois-ci est la bonne (exigeant donc un état d'urgence où tout lui serait soumis).

                    Je ne veux pas opposer une vision qui me serait propre et qui serait historiquement conditionnée par l'expérience, bien ou mal vécue, à celle de Sofri et de ses camarades. Je ne suis pas père, je n'ai pas voulu être père. Bien des fois, je suis au contraire dans la situation d'un fils, par rapport à ces jeunes, quand ils parlent comme des ministères publics, alors que moi, au lieu de me trouver à la place d'un sénateur, je suis assis au banc des accusés.

                  Malheureusement, je n'ai jamais su croire, ces dernières années, que nous étions vraiment dans l'imminence de l'Avent ; malheureusement, je n'ai pas vécu la veille d'une Révolution. Tant pis pour moi. Je sais bien que c'est manquer d'ingénuité, peut-être aussi d'amour. Par ailleurs, j'aurais eu horreur de revendiquer pour les "pauvres" l'appartement d'un immeuble avec frigidaire et vidéo, plus quelque chose de joyeux et d'extrêmement flou, qui semblait être l'idéal de Lotta continua ("prenons la ville"). J'ai eu le sentiment justement, ces dernières années, en contradiction avec tout, que la pauvreté n'était pas le plus grands des maux. J'ai plutôt commencé à regretter désespérement cette pauvreté, la mienne et celle des autres. 

                 Calderon est donc un drame politique que Sofri et en général les jeunes révolutionnaires n'entendent pas considérer comme tel. Je crois, de mon côté, qu'il y a dans cette oeuvre des éléments de caractère politique qui devrait les intéresser et précisement dans la mesure où ils peuvent influer dans une certaine mesure sur l'action politique et la modifier.

                       Dans ses trois réveils, Rosaura se trouve dans une dimension entièrement occupée par le sens du pouvoir. Notre premier rapport, à la naissance, est donc un rapport avec le pouvoir, c'est-à-dire avec le seul monde possible que la naissance nous assigne. Ceux qui, comme Rosaura, sont inadaptables ou inadaptés, au lieu de vivre cette existence préconstituée en tant que "membre normal" , la vivent en "bouc émissaire" : si Rosaura, au lieu de rester dans ces limbes réservés aux âmes malheureuses et nobles, naïves et héroïques, avait pu avancer dans la conscience de soi et donc de ses propres droits, prenant une position polémique et même révolutionnaire contre le pouvoir, elle n'aurait pourtant jamais pu éviter d'entretenir avec lui ce "rapport d'intimité" (dont Panella parlait récemment à propos du fascisme). Le pouvoir dans Calderon, s'appelle Basilio (Basileus) et a des signes distinctifs changeants : dans la première partie, il est Roi et Père (il apparaît dans le miroir - avec l'Auteur !! - comme dans le tableau des Ménines) et il est organisé de manière classique : sa conscience de soi - fasciste - n'a pas une faille, une incertitude. Dans la deuxième partie - quand Rosaura se réveille "pauvre", - sous-prolétarienne dans un village de baraquements - Basilio devient une abstraction presque céleste (il est dans le salon des Ménines vide, comme suspendu dans le cosmos,  : et de là, il envoie ses sicaires sur la terre) ; enfin, dans la troisième partie, c'est le mari petit-bourgeois, bien pensant, non pas fasciste mais pire encore. C'est dans cette troisième partie qu'il est en crise. Il ne sait plus quelle est sa "vraie volonté". Selon les règles du comportement bourgeois, il cache l'angoisse de cette incertitude qui est la sienne, et il travaille avec toute l'extrême intelligence de sa culture, pour "se comprendre". Il n'hésite pas à se servir même de la pensée de l'opposition gauchiste (les deux médecins homonynes, Manuel, psychiatres à la Basaglia¹) et même de la pensée révolutionnaire. Finalement, il comprend sa nouvelle "nature" : il s'est pour la énième fois recréé, mais pour la première fois, il s'est recréé non pas identique à lui-même.  Il a homologué maintenant parfaitement le monde sur lequel il s'exerce. Les Rosaura dès lors n'auront plus d'autres lieux où se réveiller.

                    Donc Basilio n'a rien d'un homme obtus, féroce, stupide, avide (et la vulgarité est un de ses éléments, ce n'est pas un tout) : de même qu'il dit au médecin cultivé qui soigne Rosaura : "Elle glapit sa petite-bourgeoisie, alors que moi, suivant mon destin, je la vis". Il y a en Basilio quelque chose d'ascétique, une totale identification avec sa propre fonction. C'est le pouvoir bourgeois, mais il a les caractères absolus du pouvoir, quelle que soit sa qualification (pouvoir des Soviets ou pouvoir de l'Imagination). Aucun de nous ne peut espérer s'en retrouver intact. Accuser les autres de quelque connivence avec le pouvoir, c'est exercer une forme (inconsciente) bien plus grave de pouvoir.

                  Les gauchistes pendant des années ("Gauchisme - dit-on dans Calderon - maladie verbale du marxisme !") ont fait du pouvoir (appelé "système") l'objet d'un "transfert" : sur cet objet, ils ont déchargé toutes les fautes, délivrant ainsi, par le moyen d'un mécanisme extrêmement archaïque, leur "conscience malheureuse" petite-bourgeoise.

                         A travers l'identification drastique de "système" et de "mal" - réalisée de façon manichéenne et calviniste - se sont, par voie de conséquence, dessinées sur le front opposé des formes d'existence et d'action qui devaient de force être "bonnes" : d'où le triomphalisme, le fanatisme, le désespoir. Quel poids tout cela a-t-il eu sur l'action politique (avec laquelle les gauchistes identifient totalement la politique, comme on identifierait l'application de la science avec la science) ?

                        C'est très simple. Le résultat d'une idée du pouvoir conventionnelle, approximative, banale et donc mythique et irrationnelle a fait en sorte que l'action politique contre le pouvoir - à côté des caractères d'originalité et de nécessité ancrés dans sa nature - ait également accumulé les caractères "négatifs" de l'ennemi : on ne peut mener une lutte intelligente contre un ennemi considéré comme un crétin invétéré.

                       Les jeunes de Lotta continua ont donc été limités dans leur action politique par ces deux données : a) ils n'ont pas su ou voulu reconnaître ce quelque chose d'"intime" qui les liait au pouvoir, dans l'espace duquel ils sont nés et ils se sont éduqués, en conservant de nombreux caractères sous l'étiquette de pureté absolue qu'ils se sont naïvement attribuée ; b) ils ont prononcé sur le pouvoir un jugement à priori négatif de stupidité, qui a fini par retomber sur leur lutte.

                      Une médiation, non démagogique, sur ce qu'est réellement le pouvoir, serait fort utile à ces jeunes révolutionnaires, même en ce qui concerne l'action politique immédiate, qui est la seule qu'ils considèrent (peut-être à juste titre) comme valable.


    ¹Célèbre anti-psychiatre

                                                                                                           Pier Paolo Pasolini - 18 novembre 1973.

                                                                             Extrait de Descriptions de descritions, Editions Rivages.

     

    Calderon la représentation de la représentation

    Dans cet extrait Basilio ( Alain Macé) et Manuel l'anti-psychiatre (Vincent logeot)

              

     


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  • Extrait du Scénario - Ouverture : Spectre de la rose

    Le spectre de la rose

    Photogramme du Film 16m Calderon réalisé par JM Musial -

    Prologue

    SPECTRE DE LA ROSE - Abbé de Vallemeont, Pierre de Lorraine. 1649-1721

     

    Prenez un flacon et versez l'essence vitale du pollen d'une belle rose.

    Brûlez celle-ci en cendres, que l'on mêle

    de manière qu'il y en ait assez pour une distillation.

    Extrayez le sel des cendres mêlez-le à la rosée distillée.

    Scellez le flacon avec du verre pilé et du borax¹.

     

    Posez le récipient sur du crottin frais de cheval et laissez-le en place

    pendant un mois puis exposez-le alternativement

    à la lumière de la lune et à celle du soleil, le spectre

    de la rose apparaîtra dans le verre, dans toute la beauté

    de ses pétales et de ses feuilles.

     

    Par refroidissement, il disparaîtra.

    Par réchauffement, il réapparaîtra.

    Le procédé peut être indéfiniment répété.

     

    ¹Latin médiéval (1540) borate hydratée de sodium soluble dans l'eau, à saveur alcaline, en cristaux incolore, blancs ou grisâtres.

     

     

     

    Le spectre de la rose

    Le spectre de la rose

                                            Photogramme du film 16mm Calderon réalisé par ©JM Musial

     

     

     


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  • Vsevolod Meyerhold Arrestation

    Photo anthropométrique de Meyerhold qui figure dans le dossier n°537.

     

    LETTRE AU PROCUREUR DE L'URSS (13 Décembre 1939)

    AU PROCUREUR DE L'URSS

    le détenu (arrêté le 20 juin 1939) Meyerhold-Raïkh

    Vsevolod Emilievitch (date de naissance 1874, Allemand)

     

                                                               PLAINTE ET DÉCLARATION

    L'instruction de mon affaire n°537 a été close par les services chargés de l'instruction au NKVD d'URSS le 16 novembre 1939 (mais jusqu'à présent ce dossier n'a été transmis à aucun autre service compétent)? J'ai signé la dernière feuille de ce dossier sans réserves, tout comme j'avais signé auparavant sans réserves une série de procés-verbaux, et cela, contre mon honneur.                                                                                                                                                            Mes dépositions sont mensongères. Je me suis calomnié (je me suis diffamé), j'ai calomnié d'autres personnes. De ces aveux mensongers qui m'ont été extorqués (ils ont été obtenus sous la contrainte), JE ME RÉTRACTE.

    Ces dépositions mensongères qui m'ont été extorquées sont la conséquence du fait que, pendant toute la durée de l'instruction, j'ai dû subir, moi, un vieillard de soixante-cinq ans nerveux et malade, des violences physiques et morales que je n'ai pas pu supporter, et je me suis mis à submerger d'inventions monstrueuses mes réponses au juge d'instruction. Je mentais, le juge d'instruction notait, il chargeait encore ces inventions, il dictait lui-même à la secrétaire certaines réponses qu'il donnait à ma place, et  c'est tout cela que j'ai signé. Même lorsque les violences physiques se sont arrêtées et qu'il ne restait plus que les violences morales ("l'attaque psychique"), je n'ai pas osé déclarer auprès des services chargés de l'instruction que je retirais mes signatures au bas des procés-verbaux, cette déclaration, c'est devant vous citoyen-Procureur de l'URSS, que je la fais, parce que la menace d'une reprise des violences physiques mentionnées plus haut est toujours suspendue au-dessus de ma tête ("Si tu mens nous te battrons trois fois plus fort").....

    .................

    Lettres  de Meyerhold Au Procureur de l'URSS

    Document de scéne- Editions CNRS

    Lettre à V. MOLOTOV

    2 Janvier 1940

    Au Président du Conseil des Commissaires  du Peuple de l'URSS

    Viatchlestav Mikhaïlovitch Molotov

    le détenu Meyerhold-Raïk Vsevolod Emilievitch

    (date de naissance 1874, ex-membre du Parti communiste depuis

    1918, nationalité allemande)

     

                                                                  DÉCLARATION

    "Ce que les gens se révèlent être lorsqu'ils ont peur, c'est cela qu'ils sont réellement.La peur c'est un intervalle entre les habitudes de l'homme, et dans cet intervalle, on peut voir sa nature telle qu'elle est."(Leskov).                                                                                                                                Quand les juges d'instruction ont déclenché, contre moi, l'inculpé, leurs méthodes d'intervention physique et qu'ils y ont encore ajouté une "attaque psychique", ces deux choses ont suscité en moi une peur si gigantesque que ma nature s'est découverte jusqu'à ces racines mêmes...                                                                                                                                                                                                                   Mes tissus nerveux sont apparus situés très près de mon enveloppe corporelle, et ma peau s'est révélée aussi tendre et sensible que celle d'un enfant. Mes yeux se sont montrés capables (en présence de cette douleur physique et morale insupportable pour moi) de verser des torrents de larmes. Couché au sol face contre terre, j'ai appris que j'étais capable de me contorsionner, de me tordre de douleur et de hurler comme un chien que son maître bat avec un fouet. ....

    ...

             L'effroi suscite la peur et contraint à l'autodéfense. "La mort (ô, bien sûr), la mort est plus facile que tout cela" se dit l'inculpé en lui-même. C'est ce que je me suis dit moi aussi, et j'ai commencé à me dénoncer moi-même dans l'espoir que ces autocalomnies allaient m'envoyer à l'échaffaud. C'est ce qui s'est passé : sur la dernière page du dossier de l'affaire portant le n°537 close par l'instruction se sont inscrits les terribles chiffres des articles du Code Pénal : 58, alinéas, I1 et II....

    Lettres  de Meyerhold Au Procureur de l'URSS

      -Violaine Pillot- Milczenie crédits photographiques JMMusial -Terribilita                                

                                                                  

                                                                         DÉCLARATION

    (13.I.1940, suite de la déclaration du 2.I.1940, prison des Boutyrki).

    ........Lorsque la faim (je ne pouvais rien avaler), les insomnies (pendant trois mois), les palpitations nocturnes et les accès d'hystérie (je versais des torrents de larmes, je tremblais comme on tremble dans un accès de fièvre chaude) m'ont laissé diminué, tassé, amaigri, vieilli de dix ans, tout cela a effrayé mes juges d'instruction. On s'est mis à me soigner avec zèle (j'étais alors dans une "prison intérieure" qui comportait une bonne unité médicale) et à me forcer à manger. Mais cela n'a eu d'effet qu'extérieur - physique, mes nerfs étaient dans le même état et ma conscience était aussi affaiblie, embrumée, qu'avant, car une épée de Damoclès restait suspendue au-dessus de moi : le juge d'instruction répétait sans cesse et menaçait : "Si tu n'écris pas (ce qui voulait dire - invente, alors !?), nous te frapperons de nouveau, nous ne laisserons intacte que ta tête et ta main droite, et nous ferons du reste un morceau informe, sanguinolent, déchiqueté". J'ai tout signé jusqu'au 16 novembre 1939. Je rétracte ces dépositions qu'on a obtenues par la force et je Vous supplie, Vous, le chef du gouvernement, sauvez-moi, rendez-moi la liberté. J'aime ma patrie, et je suis prêt à lui consacrer toutes les forces des dernières heures de ma vie. "

    Lettres  de Meyerhold Au Procureur de l'URSS

    PROCÉS-VERBAL DES DERNIERES PAROLES DE MEYERHOLD

    Devant le Tribunal du Collège Militaire de la Cour Suprême de l'URSS (1er Février 1940)

    /.../il est étrange qu'un homme âgé de soixante-six ans n'ait pas mis dans sa déposition ce qui était nécessaire à l'instruction et qu'il ait menti sur son propre compte uniquement parce qu'on le rouait de coups avec une matraque en caoutchouc. Il a alors décidé de mentir et de marcher au bûcher. Il n'est coupable de rien. Il n'a jamais été traître à sa patrie. Sa fille est une communiste qu'il a lui-même éduquée. Il pense que le tribunal le comprendra et aura la conviction qu'il n'est pas coupable. Il a commis des erreurs dans le domaine de l'art et il a perdu son collectif social. Il demande au tribunal de prendre en considération le fait que, bien qu'il ait soixante-six ans, il a encore suffisamment d'énergie pour réparer ses fautes là où il s'est trompé et où il a commis des erreurs. Il a écrit ces derniers temps à Lavrenti Pavlovitch, à Viatcheslav Mikhaïlovitch et au Procureur. Il croyait en la "vérité" et pas en dieu, et il y croyait parce que la vérité vaincra/../


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    Actants

     

     

     

     

     

     

     

     

     

     

     

     

     

     

     

    MILCZENIE ! Expérience d'une gravité

    Mise en scène et réalisation

    Jean-Marc MUSIAL

    Actants

    Stéphanie SKRYPCZAK

    Sylvain SOKOL

    Stéphanie CLIQUENNOIS

    Violaine PILLOT

    Franck ANDRIEUX

    Bouzid BAZI

    Jérémie BIDAULT

    Emmanuelle DUFOUR

    Pierre-Antoine ANDRE

    Lumières

    François PAVOT

    Musique

    Dimitri CHOSTAKOVITCH - String Quartett n°11,n°12,n°15   /     LAÏBACH - Jezero/Der See

    Sound Mix 

    Jean-Marc MUSIAL

    Montage film

    Virginie DI RICCI

    MILCZENIE ! a été créé au Théâtre des Nuits Blanches à Lille en 1993.

    Remerciements à Claude Saint-Paul.

     


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  • Partie 1

    Partie 2


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  • MILCZENIE! (Silence !) tente de prouver concrètement que la voie vers un théâtre libre et autonome, par rapport au texte dit d'art dramatique, est possible; mais surtout que cette découverte permet de renouer des liens imaginaires et concrets (car expérimentés) avec les metteurs en scène qui ont créé l'avènement du théâtre du XXème siècle. Naturellement, Kantor, Grotowski, Craig, Appia, Meyerhold, Taïrov.

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  • ROMA AMOR (Le pouvoir ne se partage pas)

    Conception et Mise en scène

    Jean-Marc Musial et Virginie Di Ricci

     

    Ingénieurs systèmes R&D: Eric Nivel, Vincent Foucke

    Création visuelle : Jean-Marc Musial et Virginie Di Ricci

    Régie Vidéo : Benoit Henon

    Création sonore : Jean-Marc Musial

    Régie Son : Marc Piera

    Lumières : Lionel Simonet

    Cadres directs : François Mathon et Jm Musial

    Scénographie : Jm Musial

    Masques : Virginie Di Ricci et JM musial

    Costumes : Di Ricci et  Julie Z

     

    Le Coryphée/ Drusilla/ Agrippine/Messaline/Poppée..............Virginie Di Ricci

    Germanicus/Sénèque/Asiaticus/Caligula/Néron...................Jean-Marc Musial

    Musicien/Pison/Tibère/Claude.............................................David Bausseron

     

    Production: Terribilita/Attila, Villa Medicis Hors les murs (Rome), Résidence Artiste Maison de la Villette, Festival Sans dessus dessous, La Condition Publique Roubaix, F.E.D.E.R, CNC/Dicream.

    Roma Amor a été créé du 16 au 18 février 2005 à la Condition Publique de Roubaix. 2005.



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  •                                       

    CALDERON (La représentation de la représentation)

                                                  Tragédie de Pier Paolo PASOLINI

    Réalisation et mise en scène de Jean-Marc Musial assisté de Virginie DI RICCI

     

    Dramaturgie / Iconographie  :  Virginie Di Ricci et Jm Musial

    Régie Vidéo Directe :   Benoît HENON / Vincent FOUCKE /  Nathalie MENET

    Cadres directs :   François MATHON / JM MUSIAL

    Création sonore : JM MUSIAL / David BAUSSERON

    Régie son : David BAUSSERON/  Philippe DEHASPE

    Lumières : Patrick BOURNY

    Création et Montage vidéo : Virginie DI RICCI / Jean-Marc MUSIAL

    Images 3D : DAVID VINCENT

    Projectionnistes 16mm : Pierre BRIANT / Huguo VERLINDE

     

    BASILIO...................................... Alain MACÉ

    REINE LUPE................................. Célia TORRENS

    ROSAURA................................... Virginie DI RICCI

    STELLA/CARMEN/CARMENCITA.... Françoise BERLANGER

    DONA ASTREA............................ Christime EME

    PABLO/LEUCOS........................... Bruno MARIN

    ENRIQUE/MELAINOS............... .....Bouzid BAZI

    SIGISMOND............................ .....Jean- Marc MUSIAL

    LE PRÊTRE...................................Hugues CHAMART

    MANUEL L'ANTIPSYCHIATRE........Vincent LOGEOT

    LA RELIGIEUSE/AGOSTINA...........Géraldine FRIPPIAT

     

    Coproduction : Laboratoire ATILLA, Le C.R.R.A.V, LE FRESNOY Studio National des Arts Contemporains, LE PHENIX Scène Nationale de Valenciennes , Biennale des Arts Numériques de la VILLETTE.

    CALDERON a été créé au Phénix de Valenciennes les 10 et 11 janvier 2002.


     

     

     

     

     

     


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