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° Réponse de Vincent van Gogh à G-Albert Aurier
Février 1890
Cher Monsieur Aurier,
Merci beaucoup de votre article dans le Mercure de France, lequel m’a beaucoup surpris. Je l’aime beaucoup comme oeuvre d’art en soi, je trouve que vous faites de la couleur avec vos paroles ; enfin dans votre article je retrouve mes toiles mais meilleures qu’elles ne le sont en réalité, plus riches, plus significatives. Pourtant je me sens mal à l’aise lorsque je songe que plutôt qu’à moi ce que vous dites reviendrait à d’autres. Par exemple à Monticelli surtout. [...] Ensuite je dois beaucoup à Paul Gauguin avec lequel j’ai travaillé durant quelques mois à Arles et que d’ailleurs je connaissais déjà à Paris.
Au prochain envoi que je ferai à mon frère j’ajouterai une étude de cyprès pour vous si vous voulez bien me faire le plaisir de l’accepter en souvenir de votre article. J’y travaille encore dans ce moment, désirant y mettre une figurine.
Le cyprès est si caractéristique au paysage de Provence. Jusqu’à présent je n’ai pas pu les faire comme je le sens ; les émotions qui me prennent devant la nature vont chez moi jusqu’à l’évanouissement et alors il en résulte une quinzaine de jours pendant lesquels je suis incapable de travailler. Pourtant, avant de partir d’ici, je compte encore une fois revenir à la charge pour attaquer les cyprès. L’étude que je vous ai destinée en représente un groupe au coin d’un champ de blé par une journée de mistral d’été. C’est donc la note d’un certain noir enveloppé dans du bleu mouvant par le grand air qui circule, et, opposition faite à la note noire, le vermillon des coquelicots.
Vincent Van Gogh – Cyprès avec deux figures de femmes, juin 1889, Kröller-Müller Museum, Otterlo
Tags : van Gogh, Aurier, Cyprès
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